7-10 ans

Renversante

Dans le monde de Léa et Tom, les rues et les établissements scolaires ont des noms de femmes célèbres, et ce sont les hommes qui s’occupent des enfants. Comme dans toutes les écoles, on apprend que le féminin l’emporte sur le masculin, « parce qu’il est réputé plus noble que le masculin à cause de la supériorité de la femme sur le mâle ».

Pourtant, Léa et Tom voient bien que quelque chose ne va pas… Alors ils se mettent à réfléchir et détricotent ensemble les clichés de ce monde où règne la domination féminine…

Viens dans mes bras livre incontestablement fait pour nous, qu’on te dise comme on t’aime…

Renversante-Florence-Hinckel-Clothilde-Delacroix

Le féminisme et la lutte contre le sexisme sont de sérieux sujets de prédilection chez nous (oui, de mon fait), ce sont des valeurs auxquelles nous sommes constamment attentifs, et si l’on peut apprécier certaines publications vintage malgré leur flagrante défense de l’inégalité des genres, il est hors de question aujourd’hui de laisser passer les manifestations sexistes dans nos lectures.

Alors évidemment, Renversante, et sa dystopie (soyons bien d’accord, le monde de Léa et Tom n’est pas meilleur que le nôtre) où les femmes sont au pouvoir arrive à point nommé pour accompagner les questionnements qui nous animent au quotidien. En transformant par un effet de miroir notre société patriarcale en société matriarcale, le livre met en évidence plus efficacement que de longs discours pourtant largement diffusés aujourd’hui l’inégalité crasse qui demeure entre les hommes et les femmes, et plus encore, le poids de la domination masculine sur les femmes ET sur les hommes (là aussi, la mise à mal des phénomènes de masculinité toxique et « virilité abusive » pour citer Eddy de Pretto est un sujet qui me tient à coeur).

Renversante-Florence-Hinckel-Clothilde-Delacroix

La simple inversion du paradigme permet de souligner en quelques situations bien choisies la totale absurdité de la domination masculine, et la façon dont nous l’acceptons sans ciller. On est entre l’aberration et la monstruosité, littéralement, ce que l’on devrait montrer du doigt.

Bon, c’est bien gentil tous ces théories, mais pour en revenir à nos moutons, c’est-à-dire le court roman de Florence Hinckel, celui-ci est extrêmement divertissant, tout en nous poussant dans nos retranchements quant à nos convictions relatives à l’égalité des genres – notamment les inévitables contradictions entre ce que l’on professe et ce que l’on pratique, personne n’est à l’abri à cet égard.

On a donc un chouette récit, enlevé, qui en 11 chapitres et autant de situations braque les projecteurs sur les assignations que la société nous impose selon notre genre. Et des illustrations pleine de peps et de malice qui viennent donner corps à quelques fantasmes féministes que ne renierait pas Benoîte Groult. C’est pertinent, drôle, tonique et malin.

Renversante-Florence-Hinckel-Clothilde-Delacroix

Merci donc aux autrices d’avoir inventer ce monde où le mot autrice coule de source, qui nous permet de pousser un peu plus loin encore notre réflexion sur les modalités et la nécessité d’une vraie lutte anti-sexiste dès le plus jeune âge, avec des livres et des histoires s’il-vous-plait!

Renversante de Florence Hinckel, illustré par Clothilde Delacroix, L’Ecole des loisirs, 2019

PS: il existe sur Netflix la version « pour adultes » du monde de Renversante, ça s’appelle Je ne suis pas un homme facile, et je vous jure que vous n’oublierez pas de sitôt les tailleurs shorts après l’avoir visionné. (avec Blanche Gardin dedans) (ne me remerciez pas, c’est normal).

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